L'amélioration des performances sportives d'un athlète avec un casque de réalité virtuelle

La réalité virtuelle au service de l’amélioration des performances chez le sportif de haut niveau

Le sport de haut niveau devient de plus en plus concurrentiel et en constante évolution et recherche d’innovation. Les techniques d’entraînement s’améliorent sans cesse grâce aux nouvelles technologies et données récoltées sur le terrain. Cela permet aux entraîneurs et sportifs de haut niveau (SHN) de se préparer plus rapidement, plus précisément que par le passé.

Aujourd’hui de nouveaux outils permettent d’aller plus loin dans l’intégration du numérique dans les pratiques et entraînements des SHN. Parmi ces nouvelles techniques, la réalité virtuelle (RV) est une technologie hautement immersive qui plonge l’utilisateur dans un environnement 3D virtuel, permettant une interaction en temps réel avec ce dernier, grâce à un casque de RV (en anglais Head-Mounted Display).

Si la RV a longtemps été l’apanage des laboratoires de recherche en nécessitant des ordinateurs dédiés, elle s’est depuis ouverte à d’autres situations grâce à des évolutions technologiques importantes, permettant un déploiement dans un grand nombre de configurations, en intérieur, en extérieur, à domicile comme au bureau.

Cette ouverture sur le monde permet d’aller conquérir de nouvelles applications, notamment dans les domaines de l’éducation, de la santé et du sport.
Nous présentons dans ce document quelques résultats issus de la littérature scientifique, des informations validées montrant le potentiel très intéressant de la RV pour l’amélioration des performances sportives mais également cognitives, ainsi que la prévention et la rééducation des athlètes après des commotions cérébrales.

Des faits à propos de la RV dans le sport

La RV pour le sport a donné des résultats positifs dans plusieurs cas de figures. Lorsque la RV est comparée à d’autres tâches (entraînement virtuel ou réel), celle-ci montre une meilleure adhésion des utilisateurs (Annesi et Mazas 1997), un fonctionnement cognitif plus élevé (Anderson-Hanley et al. 2012), une réduction de la fatigue (Plante et al. 2003), une augmentation de la charge que peut supporter l’athlète (Chen et al. 2015) et un plus grand plaisir lors de l’entrainement (Mestre et al. 2011 ; Murray et al. 2016). Elle permet également de conserver une motivation dans la pratique sportive associée à l’entraînement virtuel (Annesi et al 1997), un plus grand sentiment d’immersion dans la tâche (comparé à d’autres méthodes virtuelles) et facilite la création d’environnements plus riches. Enfin, les sportifs préfèrent en général utiliser des casques de RV plutôt que d’autres méthodes d’entraînements virtuels.

Les bénéfices de la réalité virtuelle pour l’entrainement

Dans de nombreux sports, la clé pour devenir un SHN est l’entraînement et la répétition. Cependant, les facteurs tels que l’organisation et la disponibilité de l’équipe, les règles, les contraintes physiques sur les corps, et même la météo, peuvent perturber l’entraînement du sportif. Le professionnalisme repousse également sans cesse les limites en particulier pour les entraînements qui sont eux aussi de plus en plus pointus. Ils sont désormais découpés en différents types permettant d’aborder spécifiquement un aspect du sport pratiqué. Cette spécialisation peut ajouter également des coûts supplémentaires en matériel.

« A l’heure où les sportifs doivent se confronter à de plus en plus de contraintes stratégiques et mentales pour faire la différence, la VR trouve logiquement sa place en complément d’une préparation mentale (basées sur des apprentissages et des notions subjectives de l’individu comme la gestion des émotions, du stress, de l’énergie, de la concentration, etc) et de l’entraînement en situation réelle (sur terrain avec phase de jeu et/ou préparation physique). La VR offre une capacité d’entraînement cognitif très intéressante par une infinité de cadres et de situations impossibles à reproduire ailleurs que ce soit par habileté mentale (ex : visualisation ou hypnose) ou en situation réelle. Elle permet en outre de quantifier et mesurer les progrès et apprentissages cognitifs pour les rendre plus performants, automatiques et intégrés par le sportif en situations réelles. Sa dimension ludique non négligeable permet également de varier les entraînements et de garder la motivation et le plaisir dans le développement du sportif, en phase de préparation comme en phase de récupération après une blessure  » 

Franck David, Préparateur Mental.

L’entraînement en réalité virtuelle aide les sportifs à aller au-delà de ces contraintes en proposant au sein d’un même outil, plusieurs types d’entraînements. La RV peut aussi reproduire fidèlement des conditions et lieux d’entrainements. C’est un point fort de cette technologie qui ici dépasse les considérations techniques ou physiques et crée une opportunité logistique sans précédent. Cela s’applique à de nombreux utilisateurs (sélections nationales, entraîneurs personnels…) et fait office de réel argument de facilitation de l’entraînement. De ce fait, la RV à le potentiel de devenir l’outil de télétravail par excellence pour le monde du sport.

Plusieurs études ont déjà prouvé que les sportifs s’entraînant dans des
environnements virtuels obtiennent des performances similaires à celles des athlètes s’étant entraînés dans des conditions sportives réelles (Bideau et al., 2004 / Vignais et al., 2015). Ces résultats ont permis de valider le transfert des compétences acquises en RV, directement en condition réelle, suggérant ainsi que cette technologie peut fournir un environnement suffisamment fidèle et qualitatif pour être utilisée comme
outil d’entraînement (Miles et al., 2012). 

Impact de la RV sur l’entrainement cognitif

Comme nous l’avons déjà mentionné, la RV a la particularité de proposer une simulation virtuelle qui trompe les mécanismes cognitifs et sensoriels du cerveau humain et de créer un véritable sentiment d’immersion dans l’espace virtuel. Ainsi, il a été noté dans plusieurs études que plus l’immersion était bonne, plus les entraînements cognitifs permettent de bonnes performances (ex : Neumann et al., 2018).

Lors d’une pratique sportive, et d’autant plus dans les pratiques de haut niveau, l’utilisation des fonctions cognitives est un facteur important de la performance. Dans de nombreuses situations, les pratiquants peuvent se retrouver dans des situations de multitâches et d’attention divisée. Or, il a été montré qu’une charge cognitive importante (ex : lancement de jeu, stratégie, gestion des adversaires), au même titre que la fatigue physique a un impact négatif sur la réalisation d’un geste moteur (Amado et al., 2015). Ainsi, entraîner des fonctions cognitives, dites exécutives, permet
aux sportifs de renforcer leurs capacités cognitives pendant l’activité sportive et, in fine, leurs performances sportives sur le terrain. La littérature scientifique a déjà révélé l’amélioration des performances lors d’entraînements cognitifs en RV (Romeas, et al 2019; Scharfen et al, 2021). Par exemple, Romeas et al, (2019) ont montré un bénéfice de 15 % dans la rapidité de prise de décision des joueurs de Football dans une tâche comme la passe, du à l’entraînement en RV au sein d’un environnement virtuel adapté à la pratique du Football. 

L’apprentissage immersif pour le sportif grâce à la RV

L’apprentissage immersif est une méthode de formation qui utilise des outils immersifs comme la réalité virtuelle pour simuler des scénarios du monde réel et entraîner les utilisateurs au sein d’un environnement reproduisant la situation à apprendre de manière réaliste.

Comme tout système numérique, les systèmes de RV permettent également d’individualiser l’entraînement et peuvent être appliqués même dans des contextes quotidiens, comme en voyage, alité ou au travail. En outre, le retour d’information (feed-back) peut être fourni par des algorithmes d’apprentissage aux athlètes en temps réel et envoyé directement à l’entraîneur (Neumann et al., 2017), lui permettant de moduler l’entraînement en continu en fonction des performances des athlètes. 

La RV offre aussi des atouts essentiels pour la simulation et l’apprentissage de stratégie de jeu en plongeant le sportif dans un espace 3D qui, quand celui-ci est réaliste, permet un apprentissage implicite et une meilleure prise de décision sous contrainte (Patterson et al., 2009). 

Tout en étant un outil qui s’affranchit des contraintes de lieux ou de personnel disponible, la RV surpasse les méthodes traditionnelles telles que l’analyse de séance de jeu sur ordinateur traditionnel en offrant une meilleure perception visuelle aux sportifs (Vignais et al., 2015). Ces résultats offrent des perspectives très intéressantes dans le cadre de séance d’analyse vidéo qui pourrait demain se dérouler entièrement en réalité virtuelle afin d’offrir une meilleure perception de la séquence visualisée tout en offrant un moyen de se déplacer en 3D pour observer différents points de vue. 

Aider à prévenir et réeduquer après une blessure ou un traumatisme crânien

Aujourd’hui, la blessure chez le sportif de haut niveau est un risque et une épreuve qu’il faut savoir gérer afin de pénaliser le moins possible la carrière de l’athlète. Plus particulièrement, la protection et la prévention chez le sportif des traumatismes crâniens (TC) restent un enjeu crucial pour la santé à long terme. Aux États-Unis, on estime chaque année le nombre de TC de 1,7 à 3,8 millions, dont environ 10 % sont dus à des activités sportives.

L’évaluation et la prise en charge d’un athlète souffrant d’un TC comprennent généralement une évaluation des symptômes, un examen médical et des tests neuropsychologiques, avec une série d’évaluations au cours des jours, des semaines et des mois de récupération qui suivent.

Prévention des traumatismes crâniens

Les entraînements cognitifs numériques ont l’avantage de pouvoir conserver et analyser facilement les performances des utilisateurs sur le long terme. Ainsi, chaque utilisateur à l’opportunité de développer une baseline de ses capacités cognitives. Ce type de métrique est difficile à mettre en place en temps normal, car la plupart des tests cognitifs et neuropsychologiques sont encore réalisés avec l’aide d’un praticien sur des supports papier. Lors de tests neuropsychologiques après une suspicion de TC, les médecins comparent généralement les performances des patients à une norme. Néanmoins, cette norme, extraite des performances d’un échantillon de la population globale, ne représente pas forcement les performances du patient, en particulier lorsqu’il s’agit de sportif de haut niveau qui disposent le plus souvent de capacités cognitives supérieures dans certains domaines comme l’attention et les fonctions exécutives (Brown et al. 2007). Par ailleurs, la littérature recommande l’utilisation de la baseline comme indicateur pour l’évaluation de l’état de santé de l’athlète après un traumatisme plutôt que la méthode normative (Louey et al., 2014).

Réalité virtuelle et traitement des commotions cérébrales

Les technologies du numérique et plus précisément la RV offrent une approche originale et performante pour prévenir et rééduquer les personnes victimes de blessure à la fois au niveau moteur, mais également cognitif. C’est ce que pointent Magio et al. (2019) dans une revue de la littérature prenant en compte 57 articles qui montrent que la RV a permis une amélioration significative dans de nombreux mécanismes cognitifs (fonctions exécutives et visuospatiales notamment) après hospitalisation pour traumatisme crânien. Ils concluent que “la RV peut être utilisée pour renforcer les effets des thérapies conventionnelles, en favorisant des séances d’entraînement plus longues et une réduction de la durée globale de la prise en charge”.

En conclusion

Ce document a présenté un aperçu de la recherche en interaction humain machine, en sciences cognitives, en sciences du sport et en médecine, montrant le potentiel très important de la réalité virtuelle et de manière plus générale, des technologies immersives et des données pour l’apprentissage, l’entraînement et la prévention des risques liés aux traumatismes crâniens chez le sportif.

Il semble que ces technologies qui arrivent aujourd’hui à maturité offrent un avantage significatif pour les acteurs du sport allant de l’entraîneur au préparateur physique et mental et à l’équipe de soin, en passant bien évidemment par les premiers intéressés, à savoir les sportifs de haut niveau. Ces sportifs pour qui la recherche de performance, mais également de santé sur le long terme est primordiale pour vivre une carrière professionnelle épanouie et sécurisée.

Références :

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Bideau, B., Multon, F., Kulpa, R., Fradet, L., Arnaldi, B., & Delamarche, P. (2004). Using virtual reality to analyze links between handball thrower kinematics and goalkeeper’s reactions. Neuroscience Letters, 372(1–2), 119–122. https://doi.org/10.1016/j.neulet.2004.09.023

Brown, C. N., Guskiewicz, K. M., & Bleiberg, J. (2007). Athlete characteristics and outcome scores for computerized neuropsychological assessment: A preliminary analysis. Journal of Athletic Training, 42(4), 515–523.

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Louey, A. G., Cromer, J. A., Schembri, A. J., Darby, D. G., Maruff, P., Makdissi, M., & Mccrory, P. (2014). Detecting Cognitive Impairment After Concussion: Sensitivity of Change From Baseline and Normative Data Methods Using the CogSport/Axon Cognitive Test Battery. Archives of Clinical Neuropsychology, 29(5), 432–441. https://doi.org/10.1093/arclin/acu020

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Maggio, M. G., Maresca, G., De Luca, R., Stagnitti, M. C., Porcari, B., Ferrera, M. C., Galletti, F., Casella, C., Manuli, A., & Calabrò, R. S. (2019). The Growing Use of Virtual Reality in Cognitive Rehabilitation: Fact, Fake or Vision? A Scoping Review. Journal of the National Medical Association, 111(4), 457–463. https://doi.org/10.1016/j.jnma.2019.01.003

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